2010 Jura - Les Salines

Quant au voyage annuel, puisqu’il est postérieur à la rédaction du Cahier spécial mais dorénavant antérieur à aujourd’hui, je me dois d’en faire un compte-rendu aussi fidèle que possible. La destination pour cette expédition maintenant ancrée dans les mœurs maloniennes était le Jura, et ce pour plusieurs raisons justifiant notre présence en cette moyennement lointaine contrée : Arc-et-Cenans illustre la volonté de Claude Nicolas Ledoux, architecte de Louis XV et Louis XVI, de créer un ensemble industriel complet, une cité idéale et fonctionnelle dédiée à l’exploitation du sel : le monde ouvrier était donc pris en compte, ce qui n’empêchait nullement cette « utopie » concrétisée d’imposer au travailleur des conditions qui nous paraissent aujourd’hui nettement moins idéales (tout en comprenant bien qu’à l’époque elles aient pu malgré tout représenter un progrès : les historiens de la salle en parleront mieux que moi).

 

Deuxième lien avec le monde du travail dont s’est préoccupé Malon, et qui a traversé tout le 19ème siècle pour s’achever au début de la moitié du 20ème : Salins et ses salines. Là aussi une muséographie exemplaire et vivante permet de mieux percevoir la dimension (confondante à mes yeux) de telles entreprises : tout ça pour l’or blanc du sel… Inventivité, créativité et dépense inconsidérée d’énergies humaines (phénomène toujours banalement d’actualité) reçoivent là un témoignage éloquent.

 

Troisième réalité ouvrière : la taillanderie de Nans où jusqu’en 1964 se fabriquaient des outils taillants (des bouloirs et des faucards par exemple) et plus spécialement des faux de toutes tailles expédiées dans la France entière. La visite guidée, avec humour et humanité, par un ancien ouvrier métallurgiste au chômage était l’occasion d’une réflexion historique autant que contemporaine sur le monde de l’emploi.

Quatrième réalité liant le Jura à la nébuleuse malonienne : Ornans, patrie natale de Gustave Courbet, où se trouve son atelier ; grand peintre et engagé communard qui avec Malon  a formé la branche minoritaire du Conseil de la Commune (mais là aussi je m’en voudrais de couper l’herbe –à la faux jurassienne- sous les pieds de Claude Latta  et je lui passe volontiers la parole pour qu’il précise cet épisode sur lequel il est d’ailleurs en train de se pencher).

 

Quatre temps forts donc de ces deux journées, et c’est maintenant qu’il convient de rendre à Césarine ce qui appartient à Marie-Thérèse : c’est en effet grâce à Marie-Thérèse Frappas (et à René son malonien de mari) que le séjour a pu se dérouler avec autant d’intensité, car si Benoît Malon était bien en filigrane au rendez-vous il n’était pas seul : l’intellect historien une fois rassasié, le physique n’a guère été négligé : une fabrique de comté, de morbier et de tato (avec dégustation), une grotte pour la marche (celle d’Osselle), la maison de Louis Pasteur à Arbois, la résurgence du Lison (cascade esthétique et vaporeuse), le musée du vin à Arbois (de beaux portraits contemporains voisinaient avec des documents historiques sur la la vigne et les vignerons), le village de bûcherons de la forêt de Chaux, et pour conclure la rencontre avec deux paysans jurassiens en retraite, Christiane et Gérard Grémion, qui nous ont parlé de leur carrière et de leur vision du monde en nous offrant à boire et à manger.  L’esprit et le corps repus les quinze présents pouvaient se remettre de leurs efforts à l’hôtel de la clairière de Chaux à la Vieille Loye, et manger encore et boire toujours, débauche totalement justifiée, il faut le préciser,  par deux célébrations méritoires : l’anniversaire de Claude Latta le 24 septembre, et l’accession au statut grand parental de Valérie Rocher dont la fille Marie l’a gratifiée d’un petit Ethan fin août. La bande des treize renouvèle ses remerciements à leur G. O. (Gentille Organisatrice), et ne peut que l’inciter bien évidemment à réitérer l’expérience pour la sortie 2011… cela dit sans aucune obligation bien sûr !